21 juillet 2024

MURAKAMI Haruki - Autoportrait de l'auteur en coureur de fond

Autoportrait de l'auteur en coureur de fond est un récit autobiographique de l’écrivain japonais Haruki MURAKAMI (1949-). Belfond, 2009 (2007), 221 pages.

Machine à courir 

Alcool, tabac, drogues,... certains écrivains ont des substances qui leur collent à la peau et à la page. D'autres écrivains relativisent toutefois cette image de l'artiste vicié, en présentant une addiction plus saine comme le sport. Haruki Murakami nous présente le sien : la course de fond. 

Le quotidien sportif d'Haruki Murakami débute à l'automne 1982, alors qu'il a 33 ans. Durant les 25 ans qui suivront et plus encore, il courra une moyenne de 10 km/jour et participera chaque année à un marathon, voire à des triathlons. D'où vient sa motivation ? Quels sont ses obstacles ? Quelles sont ses récompenses ? Cet autoportrait contient les réflexions de l'auteur sur la place de sa discipline sportive au sein de son métier d'écrivain et de sa vie d'homme.

Outre le sport, nous découvrons aussi la naissance du romancier. Murakami explique comment il a abandonné son activité prometteuse de gérant de club de jazz au profit du pari risqué de vivre de son écriture. Il aborde ainsi certaines qualités nécessaires, pour lui, à la vie de romancier : le talent, la concentration, la persévérance et la gestion de la condition physique. En ce qui le concerne, il a naturellement fortifié ces qualités par sa pratique de la course de fond. 

L'ouvrage n'a pas de grande prétentions stylistiques ou narratives. Mais pas besoin de cela pour présenter, en toute simplicité, une philosophie inspirante. Celle qui vise à poursuivre ses objectifs personnels plutôt qu'à se placer en compétition avec autrui, à privilégier le plaisir et non la course contre le temps, à rechercher la justice dans une réalité injuste, à ne pas se soucier de ce que les autres pensent, et, surtout, à être en action pour dépasser l'inévitable souffrance.

Ce récit témoigne que le sport peut apporter une énergie, un équilibre, ainsi qu'une santé propices à la poursuite — à long terme — du métier d'écrivain. Simple et sans leçon de morale culpabilisante, l'on y découvre la sagesse particulière d'un artiste devenu machine à courir. 

Extrait : 

« Si la souffrance n'entrait pas en jeu, qui diable s'embêterait à des disciplines telles que le triathlon ou le marathon, qui réclament autant de temps et d'énergie ? Ce qui nous procure le sentiment d'être véritablement vivants - ou du moins, en partie -, c'est justement la souffrance, la souffrance que nous cherchons à dépasser. Notre qualité d'être vivant ne tient pas à des notions comme le temps que l'on réalise ou le rang, mais à la conscience que l'on acquiert finalement de la fluidité qui se réalise au cœur même de l'action ».